Chez Félix & Ludo, nous nous intéressons beaucoup aux neurosciences pour comprendre les rouages de l’apprentissage et créer des mécanismes de jeu pertinents.
Cependant, nous ne sommes pas les seuls à nous pencher sur ce champ scientifique « à la mode » et, parfois, l’engouement du sujet propage des idées fausses. C’est ce qu’on appelle les neuromythes, mot valise associant « neuroscience » et « mythe ».
Les neurosciences, qu’est-ce que c’est ?
Pour commencer, penchons-nous sur les neurosciences.
Les neurosciences regroupent l’ensemble des disciplines étudiant le cerveau et donc par extension, le système nerveux. C’est une science pluridisciplinaire qui fait intervenir entre autres, la biologie, la physique ou encore la psychologie.
Le terme de neuroscience apparaît dans les années 60 et ce champ se développe considérablement grâce aux imageries cérébrales.
Chez Félix & Ludo, nous nous intéressons plus particulièrement aux neurosciences en éducation et les rumeurs vont bon train à ce sujet.
Et les neuromythes ?
Les neuromythes constituent des croyances sans fondement, relatives au cerveau et à son fonctionnement. Bien qu’elles ne soient nullement reconnues par la recherche scientifique, ces croyances sont souvent diffusées avec la promesse d’améliorer l’efficacité de notre apprentissage.
Or, les neuromythes découlent souvent d’une mauvaise compréhension ou d’une distorsion volontaire de résultats scientifiques en neurosciences.
On attribue ce terme au neurochirurgien Alan Crockard. Il l’aurait utilisé pour la première fois dans les années 80 afin de décrire ce phénomène.
Ainsi, les neuromythes peuvent s’avérer véritablement contreproductif dans le domaine de l’éducation. Si de nouvelles méthodes d’apprentissage sont susceptibles d’être basées sur certaines de ces théories attractives, c’est au mépris d’autres méthodes qui sont belles et bien reconnues efficaces par la recherche.
Quelques exemples de neuromythes dans l’apprentissage
Je n’utilise que 10% de mon cerveau
FAUX !
Merci Luc Besson pour cette ancienne idée reçue remise sur le devant de la scène dans le film Lucy (2014) !
Voilà peut-être une information décevante mais nous utilisons bien les 100% de nos capacités cérébrales. En revanche, il est vrai que nous ne mobilisons pas l’ensemble de notre cerveau tout le temps ou simultanément. Mais chaque zone est utile et utilisée, même durant notre sommeil.
J’ai un style de mémoire kinesthésique,
j’apprends mieux en écrivant
Que vous ayez des préférences d’apprentissage, ça, c’est vrai. Cependant, aucune étude n’a démontré que nous enseigner par notre canal d’apprentissage préféré faciliterait ou même ancrerait plus rapidement ces apprentissages. Dans cet exemple-ci, la mémorisation et la compréhension ne seront donc pas meilleures si l’élève écrit ou si l’apprentissage se fait par un autre canal.
D’ailleurs, privilégier un apprentissage multimodal serait plus efficace dans l’acquisition de connaissances. Plusieurs supports pour plus d’efficacité !
Cerveau gauche, plus logique,
cerveau droit plus créatif
Un neuromythe répandu est celui qui scinde les deux hémisphères du cerveau pour leur attribuer des caractéristiques particulières. Ainsi, le « cerveau gauche » serait dédié à la logique, aux mathématiques, au rationnel tandis que le « cerveau droit » abriterait le siège des émotions, de la créativité, de l’imagination. Certains apprenants auraient alors plus un « cerveau droit » et d’autres plus un « cerveau gauche ».
Là aussi, fausse croyance ! Notre cerveau est bien plus complexe que ça. La créativité, par exemple, active des zones du cerveau dans les deux hémisphères.
Il n’existe pas de dominance hémisphérique !
La gym du cerveau améliore la concentration,
les apprentissages…
Si l’éducation physique est bien entendue indispensable à notre bonne santé, les exercices de coordination pour optimiser le développement de notre cerveau sont demeurés sans preuve de leur efficacité. Il n’existe pas un déséquilibre du cerveau comme il n’existe pas de latéralité du cerveau !
Pour améliorer ma mémoire,
je vais apprendre par cœur
« Apprend tes poèmes, tu auras une meilleure mémoire ! » Eh bien ça c’est comme la soupe, c’est bien pour nous motiver, mais dans la réalité, ça ne fonctionne pas !
Si certains apprentissages comme les poèmes ou l’histoire requièrent un apprentissage par cœur, dire qu’ils améliorent la mémorisation est FAUX. L’accès à l’information retenue par cœur se fera plus rapidement mais la mémoire n’est pas un muscle, elle ne s’entraîne pas, elle ne s’étend pas à un autre domaine.
On peut par contre développer des stratégies de mémorisation (non sans efforts) mais là aussi, si la discipline change, rebelote.
Par exemple, on dit des joueurs d’échecs qu’ils ont bonne mémoire. En effet, il est plutôt impressionnant de retenir 25 pièces disposées sur l’échiquier en moins de 5 secondes. Cependant, si on choisit de disposer les pièces au hasard, on se rend compte que le joueur d’échec aura autant de mal qu’un autre à retenir la disposition de chacune.
Pourquoi ?
Parce qu’il ne peut pas se fier à ses connaissances préalables sur les configurations du jeu d’échecs pour s’aider. La logique sous-tendue par le jeu s’effondre, le joueur n’a plus de longueur d’avance.
Morale de l’histoire, attention à vos sources… Pour un sujet scientifique, privilégiez une revue scientifique !
Si le sujet vous intéresse, je vous invite à relire notre interview d’Augustin RICHARD, docteur en neurosciences qui vous parlera de la neuroscience au service de la ludopédagogie !
Article écrit par Ilona Niang
Sources
- AFSC-Fiches-Theoriques-Les-neuromythes.pdf.
- bf6id-neuromythes_neuroe_ducation_que_bec.pdf.
- Blanchette Sarrasin, J. & Masson, S. Connaître les neuromythes pour mieux enseigner. (2017).
- Doudin, P.-A. & Tardif, E. Neurosciences et cognition: Perspectives pour les sciences de l’éducation. (De Boeck Superieur, 2016).
- Nzebo, H. & Morgantini, S. Neurosciences et neuromythes: représentations chez des élèves du primaire et du secondaire I. doi:10.22005/bcu.16686.